Dans le mur... du son !

Label : Richter Collective

Sortie : 02/05/11

Format : CD / LP

Disponible : Import

Même si vous n'aviez jamais entendu parler de And So I Watch You From Afar et à moins que vous ne soyez un novice en matière de musique "indé" (mais comment avez vous atterri ici ?), il est probable que vous ayez compris qu'il s'agit ici d'un disque de post-rock. Et il est d'ailleurs fort possible que vous n'ayez jamais entendu parler du groupe irlandais vu que, malgré une presse dans l'ensemble très enthousiaste, sa musique instrumentale (à part quelques grognements et quelques "pa pa" ici ou là...) ne semble pas réussir pour l'instant à sortir d'un public de spécialistes. Et il est vraisemblable que Gangs n'arrivera pas à y changer grand chose, alors que l'on est en face d'un des plus sûrs espoirs d'un genre devenu de moins en moins intéressant à force de se mordre la queue.

On pourrait se demander pourquoi cette difficulté à élargir son audience et à atteindre (ou du moins s'approcher un peu) un niveau de reconnaissance comme Mogwai, 65daysofstatic, Godspeed ou Explosions in the Sky mais d'une part il faut sans doute leur laisser un peu de temps (comme Rome, aucun de ces groupes ne s'est fait en un jour) et d'autre part le quatuor semble faire tout pour ne pas être consensuel, même auprès des amoureux du genre, en s'amusant des conventions et des dictats habituels.

Sur beaucoup de points, Gangs apparait alors comme la synthèse de cinq années de recherche. On y retrouve ainsi les effets de structures et de textures "classiques" qui peuplaient This Is Our Machine and Nothing Can Stop It, le désir d'expérimentations ludiques et de mélanges (prog, math, métal... valse...) qu'on trouvait sur And So I Watch You From Afar ainsi que le côté brutal sans relâche de leur dernier EP, The Letters. Et le résultat est fichtrement excitant, ni plus ni moins qu'un des meilleurs disques instrumentaux de ces dernières années.

Murs de guitares lumineuses, riffs d'une extrême violence, batterie agressive et frénétique... les amateurs de post-rock atmosphérique risquent d'être un peu bousculés. S'ils arrivent cependant à faire un peu abstraction du côté bruitiste, ils découvriront un album parfaitement construit dans ses (longs)  titres comme dans son ensemble, des recherches de sonorités particulièrement subtiles ainsi qu'une capacité rare à mêler rythmes et ambiances divers (ce qui manquait sérieusement à The Letters trop concentré sur le côté noisy sans aucun répit). Un sacré bon disque !  Mais ce qui finit de faire la différence entre Gangs et tant d'autres disques du genre, entre And So I Watch You From Afar et la plupart de ses "concurrents", c'est que la musique n'est pas ici sombre, planante, dépressive ou oppressante, non, elle est terriblement chaude, joyeuse, sautillante et festive. Le groupe semble s'éclater et communique son plaisir (avouez qu'on ne peut pas dire ça de Mogwai...) avec un entrain rare. Reste à savoir maintenant si après ce fantastique disque-bilan, ASIWYFA (argh, j'avais résisté jusque là) saura se réinventer ou finira par tourner en rond.

lyle

http://www.myspace.com/andsoiwatchyoufromafar