Interview : Milk & Fruit Juice
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Près d'un an après la dernière, c'est le retour des interviews sur DLMDS, et on recommence fort en cette période de fêtes, avec Milk & Fruit Juice !
Bonjour, comment faut-il vous appeler Milk ou Fruit Juice ? Bonjour, MiLK ou MiLK & Fruit Juice, mais sinon Michel c'est bien aussi.
MiLK & Fruit Juice est-il un artiste solo ; un projet solo avec un collectif de musiciens toujours en évolution autour genre Destroyer / Songs : Ohia ou un "vrai" groupe ?
MiLK & Fruit Juice c'est en fait un projet solo au départ et sur disque c'est vraiment ça. Je fais tout sauf certains chœurs fait par Cococerise et Littlesa. Du coup on peut distinguer MiLK&FJ sur disque et MiLK&FJ sur scène. Mais sur scène là encore le nombre de membres est variable en fonction des disponibilités de chacun. L'homme mystère, notre batteur, aime à dire qu'il est juste un prestataire dans le groupe. Donc oui on peut dire quelque part projet solo avec un collectif de musicien, même si j'aime à penser que sur scène on est un vrai groupe.
Le ukulélé reste l'instrument caractéristique de MiLK&FJ. Les morceaux sont-ils contruits autour de lui ou n'intervient-il que tardivement dans le processus d'écriture ?
La plupart des chansons sont écrites avec un ukulélé même certaines qui ne sont pas arrangées forcément avec du ukulélé dedans. Je pense par exemple à 'the girl who was born in the bow of laundry powder' dans le second album, elle a d'abord été composée avec le ukulélé et ensuite je me suis dis qu'elle serait plus chouette juste avec de la guitare. Il m'arrive aussi de composer à partir de la guitare ou le banjo et généralement pour ces chansons je n'utilise pas de ukulélé dans les arrangements. J'aime bien composer sur le ukulélé parce que les mélodies me paraissent souvent plus évidente, probablement parce que c'est un instrument plus limité et du coup on peut aller plus facilement à l'essentiel. Depuis 2/3 ans, le ukulélé est revenu en force avec le banjo et l'autoharpe. C'est de votre faute non ? Hahahah mais oui voyons on est tellement influent que toute la scène indépendante et pas que, a suivi le mouvement. Ce que je sais c'est que la personne qui m'a donné envie de faire du ukulélé c'est Yaya Herman Dune et qu'en suite j'ai vraiment eu envie de composer avec grâce au Magnetic Fields. Faut pas oublier que Stephin Merritt l'utilise depuis bien plus longtemps. Après oui c'est à la mode parce que bon le ukulélé c'est mignon, ça a un son caractéristique et c'est facile à transporter. Enfin sinon plus sérieusement c'est aussi lié à une recherche de nouvelles sonorité. En ce qui me concerne je n'aime pas les guitare folk de manière générale du coup un jour je me suis dis bêtement "faisons du ukulélé l'élément central à la place de cette guitare folk". Je pense que je ne suis pas le seul à avoir eu cette idée héhé . Oui, mais d'habitude ça donne un côté soit fun soit roots. Alors pouquoi là, ça a si souvent un petit côté acidulé, voire mélancolique ? Peut être parce que justement je ne cherche pas à utiliser le ukulélé dans le but que ce soit fun ou roots comme tu dis. Je l'utilise vraiment comme on utiliserait une guitare ou un piano qui sont des instruments avec une tessiture neutre, ensuite ce sont les compositions qui font qu'une chanson est mélancolique ou pas, acidulé ou pas. Parlons un peu de ce nouvel album que je ressens justement particulièrement mélancolique. Pourquoi ce titre I'm cold handed cause I have no heart to pump the blood through my fingers ? Alors en fait un jour on m'a fait remarquer que j'avais les mains froides et en y réfléchissant je me suis rendu compte que j'avais tout le temps les mains froides justement. Du coup je me suis demandé pourquoi. Souvent c'est lié au fait qu'on a un cœur qui ne pompe pas suffisamment fort. Partant de là je me suis dis que ça ferait un bon titre d'album parce qu'on peut aussi le lire de différentes manières. J'aime bien quand les ils y a plusieurs niveaux de lecture. Et quelle que soit la manière dont on peut lire ce titre, je trouvais que ça correspondait bien à mon état d'esprit au cours de l'année où j'ai enregistré cette album. On en revient à ce côté sombre. Alors que Nobody listens to silent people proposait quelques respirations plus rythmées et plus légères (genre 'Intend to be happy'), ce nouvel opus semble d'une humeur particulièrement maussade. Un disque parfait pour cet hiver neigeux ? C'est marrant que tu dises ça parce que moi je ne le trouve pas particulièrement sombre en fait en tout cas pas plus que le précédent. 'Intend to be happy' et 'Basement of my brain' étaient finalement de fausses amies parce qu'elles avaient peut être l'air d'être des chansons joyeuses mais elles parlent toutes les deux de ruptures et sont toutes deux assez tristes finalement. Pour le nouvel album les chansons sont toujours assez mélancoliques certes, mais de mon point de vue elles sont moins tristes que les chansons du précédent. Mais après oui la mélancolie colle bien à la météo actuelle. Par contre non je ne dirais pas maussade. Mais maussade ce n'est pas du tout négatif de la part de quelqu'un dont deux des groupes favoris sont Cure et Lush. C'est juste ce sentiment qu'il n'y a aucune raison d'être exagérément enjoué avec ce que la vie nous réserve au jour le jour... et c'est un peu ce qui ressort en écoutant MiLK&FJ. Ah oui dans ce sens là, je suis plus d'accord. Aussi bien qu'il n'y a pas de raison d'être exagérément enjoué, il n'y a pas non plus de raison d'être exagérément triste. Le choses sont ce qu'elles sont. Il doit effectivement y avoir un peu de cette idée dans ce second album et plus généralement dans l'année que j'ai passé à le réaliser. Les relations amoureuses semblent être un thême important chez vous (comme chez beaucoup d'autres en fait). Le sel de la vie ou juste un point d'entrée dans d'autres problèmes plus profonds ? Oui peut être bien un point d'entrée dans d'autres problèmes plus profonds, mais de manière générales véritablement ce sont les relations entre les gens amoureux ou non qui m'intéresse, la façon qu'ils ont d'interagir entre eux. La situation actuelle ne vous donne pas envie de partir dans des textes plus politiques ou sociaux ? Ooh que non. Je trouve que c'est bien d'être engagé mais je ne me sens pas d'en faire de la musique. L'engagement politique pour moi c'est quelque chose de privé ; c'est bien d'exprimer son opinion mais je ne crois pas que ce soit une si bonne idée de le faire par la musique. D'autant que la musique me permet d'échapper à une certaine réalité, ce serait mal venu de la réinclure dedans. Puis après tout je fais de la pop, et en ce sens je n'ai pas envie de parler de chose fâcheuse dans mes chansons. Baser sa créativité sur la colère et la contestation de mon point de vue ce n'est pas forcément sain, parce que le jour où on est plus en colère qu'est ce qui se passe ? On ne crée plus ? Après rien n'empêche d'être engagé dans sa vie privé. J'aime l'idée qu'on peut faire évoluer les choses de proche en proche, être engagé, en discuter avec son entourage proche, amener une réflexion avec eux qui le feront eux aussi de proche en proche. Je préfère essayer de faire évoluer les choses de cette manière plutôt que de le faire par mes chansons, d'autant que je ne suis pas persuadé qu'il y ait énormément de personnes qui s'interesse de prèt à mes paroles. Pour moi faire évoluer les choses c'est établir un débat et donc il y a forcément un échange de point de vue. Exposer ses opinions dans une chanson c'est une façon un peu unilatérale d'essayer de faire évoluer les choses. Et puis surtout je n'ai pas la prétention de détenir la vérité héhé :) La musique folk a autrefois servi à un certain engagement politique au sens le plus noble du terme et il est justement intéressant de vous voir utiliser le mot "pop" pour parler de votre musique. Où vous placez-vous par rapport au renouveau folk, aussi bien français qu'international qui a envahi les ondes (ou plutôt les blogs d'ailleurs) ces dernières années ? Oui effectivement c'était le sens noble du mot folk. Et donc par rapport au renouveau folk et bien je ne sais pas. A une époque je me sentais proche du mouvement affreusement nommé anti-folk. Maintenant j'écoute assez peu de folk. C'est toujours assez difficile de se mettre dans une case, oui tous le monde dit ça mais c'est terriblement vrai et comme je n'ai pas particulièrement envie de me cantonner à un seul style j'utilise le mot générique "pop" comme ça ça me laisse la possibilité d'explorer tous les styles qui m'intéressent. Aussi ces derniers temps j'ai l'impression qu'on utilise le mot folk peut être à tort. Finalement aujourd'hui je ne suis même pas sûr de savoir ce que veut vraiment dire folk.
Il y a depuis quelques années toute une "scène" parisienne (Orouni, Michael Wookey, (Please) don't blame mexico, Mina Tindle...) qui peut en effet se réclamer de la scène anti-folk anglo-saxonne tout en se permettant un côté pop et ludique. Comment expliquez-vous qu'à part Toy Fight elle n'ait pas réussi à éclater au grand jour ? Héhé bonne question, j'aimerais bien savoir y répondre. Je dois avouer que ça fait mal au coeur de voir des groupes aussi talentueux que ceux cités ne pas être plus connus et je dis pas ça juste parce que ce sont mes amis. Mais en plus de la difficulté de se faire connaitre je pense que quelque part les aléas de la vie font que des fois ça se goupille pas forcément bien. Enfin je ne sais pas trop, je pense être mal placé pour répondre à cette question en fait. Mais en tout cas c'est déjà formidable que Toy Fight ait pu percer. Ensuite au début de l'année sortira l'album de (Please) don't blame mexico sur ce merveilleux label Sauvage records, je leur souhaite un franc succès. L'année prochaine on attend aussi avec impatience l'album de Mina Tindle. Donc ça se trouve ça sera leur année et ils pourront éclater eux aussi au grand jour, en tout cas moi je croise les doigts pour eux parce qu'ils le méritent. Comme tu évoques l'excellent label Sauvage Records (et on pourrait aussi parler de Monster K7), comment ce fait-il que vous ayez choisi de distribuer vos albums vous-même ? Tout simplement parce que j'aime bien ce mode de fonctionnement, qu'avec les autres membres du groupe on fasse tout un peu à la manière d'une petite entreprise familiale. Du coup ça nous permet de faire les choses à notre rythme et à notre manière sans embêter nos amis de MonsterK7 ou Sauvage Records :) La situation actuelle de "l'industrie musicale" est considérée comme difficile aussi bien du côté des gros ("nos produits ne se trouvent même plus en supermarché, ma pov' dame") que des petits ("avoir 10 000 amis c'est facile, mais leur faire débourser un centime..."). Comment la percevez-vous, du haut de votre petite entreprise ? :-) J'ai l'impression que c'est un sacré foutoir héhé. Peut-être bien qu'il faudrait penser à changer de modèle économique, évoluer vers une autre manière de distribuer la musique et surtout de repenser la manière de redistribuer l'argent aux artistes. Après j'ai aucune idée du bon mode de fonctionnement à adopter. J'ai juste l'impression qu'il y'a une grosse inertie et pas mal d'hypocrisie dans cette histoire. et que pour l'instant personne n'a trouvé la solution pour rompre cette inertie. En ce qui concerne notre petite entreprise elle a surtout pour but de partager notre musique et nous n'avons pas vraiment de pression financière à par l'amortissement des frais engagés pour la production d'album, parce que nous avons tous un boulot. Du coup je ne sais pas si on peut vraiment dire que nous faisons partie de cette industrie. Quoi qu'il en soit l'impression que j'ai, c'est qu'il est extrêmement difficile de vivre de la musique, mais bon je pense que je vous apprends rien en disant ça :) Justement, comment réussir à partager cette musique d'un point de vue national voire international alors que les gens sont confrontés à une "offre" qui n'a jamais été aussi considérable ? Je suppose que c'est là qu'interviennent les blogs, les webzines et les réseaux sociaux. Après on peut pas obliger les gens à être curieux. Autrement il y a aussi le bouche à oreille, c'est long et laborieux mais ça marche. Et sinon il y a le coup de bol par exemple la demande d'utilisation de la musique dans un autre média. On a eu cette chance à l'époque du premier album. En fait, j'ai des amis qui sont à l'origine d'une série diffusé sur la chaine Nolife qui s'appel Nerdz, et ils m'ont demandé de faire le générique de début pour leur saison 2 ce que j'ai fait. Je leur ai aussi prêté 2 morceaux pour leur générique de fin. Et en fait grâce à l'utilisation de ma musique par cette série le première album s'est plutôt bien vendu pour une autoproduction. Après ce que je pense c'est qu'au départ on commence toujours par se faire connaitre dans des niches finalement et ce qu'il faut faire pour être encore plus connu c'est essayer de diversifier ces niches en allant faire de la promos là où on nous attend pas forcément. Mais bon là encore je n'ai pas trouvé la recette parfaite, ça se saurait. Nos lecteurs peuvent espérer vous voir sur scène un jour prochain ? Oui !!! Le 17 janvier prochain au Pop In 105 rue Amelot dans le 11ème à Paris avec NITNEROC un super groupe du label MonsterK7. Et pour les non-parisiens, rien de prévu ? Oui malheureusement pour les non parisien rien de prévu. C'est là où notre petite entreprise familiale trouve ses limites. C'est que c'est toujours compliqué d'organiser des concerts ailleurs que là où on vit. Ils se consoleront en achetant l'album que l'on peut trouver... sur http://milkandfruitjuice.bigcartel.com ainsi que sur itunes. Bon, eh bien bonnes fêtes et merci ! Merci à toi :) et bonnes fêtes !
http://www.myspace.com/milkandfruitjuice
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