Dernier jour parisien du festival Out of the Blue et programmation impeccable pour une salle bien trop peu garnie. Dommage, les conditions étaient parfaites pour profiter de ce genre de groupes. Après la multiplication des groupes post-rock techniquement compétents mais copiant servilement les modèles des grands anciens, c'est maintenant dans le domaine de l'ambient / shoegaze que l'on voit se multiplier les groupes. Et forcément cela devient de plus en plus difficile pour eux de convaincre. Si on remarque immédiatement quelques têtes connues (venues entre autres de 21 Love Hotel ou Heligoland), ce qui frappe au début c'est l'écart entre la musique, impeccable, et le chant, qui n'est pas sans évoquer une version parlée de Caroline Finch, la chanteuse de feu Linoleum; le problème n'étant pas que ce chant soit mauvais mais qu'il ne semble pas s'insérer (mais c'est peut-être l'effet recherché) à la musique, qui oscillera entre ambient synthétique (excellent premier morceau) et post-rock violent nappé de feedbacks de guitares. On aura d'ailleurs préféré ces derniers passages, dépourvus de chant. En mettant un rideau devant le groupe pour projeter un film lors du dernier morceau, Farewell Poetry fait preuve à la fois d'une grande ambition artistique (multimédia donc...) mais aussi d'une maladresse évidente, car il est difficile de ne pas décrocher durant ces longues dernières minutes. Mais on suivra avec un grand intérêt l'évolution de ce groupe qui reste très jeune. Et dès les premières notes, on se dit qu'il aurait beaucoup à apprendre d'un groupe comme Glissando. Le quintet de Leeds a, comme tant d'autres groupes de la ville (worriedaboutsatan, I concur, I like trains, Her name is calla...), trouvé son propre son, son propre univers en mixant des influences aussi bien post-rock que slowcore, ambient ou shoegaze. Il faut dire que le mélange entre le timbre folky de Elly May Irving, sorte de moderne Tori Amos, son sobre jeu de piano et les montées sonores du reste du groupe, s'il surprend un peu au début, nous convainc très vite de sa parfaite alchimie. On pense à Gregor Samsa, par ce côté complexe et raffiné, froid et mélancolique, mais la musique de Glissando se révèle plus facile d'accès, par ce côté pop nettement plus prononcé dont tant de groupes anglais ne peuvent se départir (et c'est tant mieux). Que ce soit dans les moments les plus calmes ou dans les plus violents (rares et restant toujours mesurés, cependant), on se laisse flotter dans une atmosphère de beauté et le retour sur terre sera bien trop brusque et rapide. Mais comme il reste encore deux groupes à venir, le set ne pouvait être trop long. Une magnifique découverte cependant. On est un peu anxieux, après un tel moment, de voir comment Heligoland va être capable de prendre la suite, d'autant que le groupe sort d'une longue et fatigante tournée dans les pays nordiques et de l'est. Mais on est vite rassuré : le groupe n'a rien perdu de son énergie et de ses qualités. S'il est sans doute inutile de parler trop longtemps du concert en lui-même, ayant déjà beaucoup parlé du groupe en ces pages et ailleurs, il est par contre frappant de voir comment, avec des influences et des ingrédients similaires (voix folk et musique shoegaze, entre autres) à Glissando, les musiques se révèlent totalement différentes, l'une plutôt glacée et introspective, l'autre beaucoup plus chaude et héroïque. Dans tous les cas, encore un excellent concert d'un groupe dont on n'en peut plus d'attendre le troisième album et de ne pas comprendre pourquoi il n'est pas beaucoup plus connu. Pour conclure la soirée (devant une salle qui s'est malheureusement dégarnie, ne laissant qu'une poignée d'aficionados, ce qui n'est pas surprenant après 23:30...), c'est le grand retour en France de Trespassers William, souvent cité dans la deuxième génération de groupes slowcore. Le duo composé de Matt Brown et Anna-Lynne Williams (malheureusement un peu souffrante), accompagné pour l'occasion de Richard Knox de Glissando ne m'a jamais totalement convaincu sur disque et c'est fatigué mais curieux que j'espère que leur performance live me fera enfin comprendre une musique dont j'ai toujours eu l'impression que je devrais l'adorer. Mais j'ai finalement compris pourquoi je n'arrivais en fait pas à adhérer totalement. Oui, il y a beaucoup de "Je" dans ce paragraphe, mais le ressenti personnel est ici plus important que tout. Car Trespassers William est un groupe à la grande finesse instrumentale, aux mélodies recherchées et délicates, dont la chanteuse à une voix subtile, et je me laisse subjuguer... pendant deux ou trois titres. Et puis l'ennui gagne. Le sentiment insidieux et déplaisant de monotonie, de redite, se fait pressant. La désagréable impression de ne rien éprouver quand on devrait être conquis... Trespassers William nous a objectivement proposé un très beau concert qui aura ravi ses fans, mais n'est, définitivement, pas un groupe pour moi. C'est néanmoins avec un grand sourire (merci Out of the Blue) que je retrouve les rues de Paris dans une douce chaleur automnale.
lyle
http://www.myspace.com/trespasserswilliam http://www.myspace.com/heligoland |
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